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Mobilité et trafic pendulaire

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Mobilité et trafic pendulaire

L’essentiel en bref:
  • Les prestations de transport dans le trafic voyageurs ont constamment augmenté au cours de la dernière décennie (avant la pandémie de coronavirus). Les perspectives de la Confédération dans ce domaine partent du principe que la prestation globale de transport de personnes continuera d'augmenter en raison de la croissance démographique, mais que la distance journalière moyenne parcourue par personne diminuera.
  • Le comportement en matière de mobilité de la population urbaine et rurale diffère: les habitants des régions rurales parcourent en moyenne plus de kilomètres par jour et utilisent plus souvent le transport individuel motorisé (TIM).
  • Au cours des 30 dernières années, le nombre de pendulaires a augmenté de manière significative et plus que proportionnelle à la croissance démographique. En termes relatifs, ce sont les flux de pendulaires des espaces urbains et intermédiaires en direction des espaces ruraux qui ont le plus augmenté. En valeur absolue toutefois, ce sont clairement les flux de pendulaires entre les villes qui ont connu la plus forte augmentation.
  • Le comportement en matière de mobilité de la population urbaine et rurale va continuer à se modifier à l'avenir en raison de différentes évolutions et tendances (démographie, bureau à domicile, nouvelles offres de mobilité). Les nouvelles offres de mobilité recèlent à cet égard un grand potentiel pour une meilleure desserte des espaces périphériques.

Introduction

La population suisse est de plus en plus mobile. Le nombre de personnes-kilomètres parcourus (produit du nombre de personnes transportées et des distances qu'elles ont parcourues) n'a cessé d'augmenter ces dernières années. Alors qu'en 2008, 115 milliards de personnes-kilomètres avaient été parcourues, ce chiffre est passé à près de 140 milliards en 2019, ce qui correspond à une croissance de plus de 20 %. Les parts du trafic individuel motorisé (TIM) et de la mobilité douce (marche, vélo) ont légèrement augmenté durant cette période, tandis que la part des transports publics (TP) a évolué de manière moins que proportionnelle. 
L'effondrement de la performance transport en 2020 est dû à la pandémie du coronavirus – on trouvera plus d'informations à ce sujet dans le commentaire ci-dessous.

Cette évolution est toutefois fortement influencée par la croissance démographique. La distance journalière moyenne parcourue par personne n'a en conséquence augmenté que de 5 % entre 2000 et 2015.

Selon les perspectives de transport de l'Office fédéral du développement territorial (ARE), il faut s'attendre à ce que la prestation de transport dans le trafic de personnes continue d'augmenter. Toutefois, contrairement à ce qui était prévu jusqu'à présent, la distance journalière moyenne parcourue par personne devrait diminuer. L'une des principales raisons en est le vieillissement démographique croissant, qui entraîne une diminution proportionnelle de la population active. A cela s'ajoutent de nouvelles formes de travail, comme le home office, qui induisent une nouvelle réduction des trajets pendulaires.
 

Les populations urbaines et rurales ont des comportements de mobilité différents 

Selon le microrecensement mobilité et transports 2015, les trajets effectués peuvent également être évalués au niveau régional. Alors que 60% de tous les trajets se font à l'intérieur ou entre des espaces urbains, les liaisons entre les communes rurales en représentent 11%. Ces valeurs sont dues en premier lieu à la part de population de chaque espace - mais pas seulement - car le comportement de la population en matière de transports diffère selon le type d'espace.

Il existe par exemple des différences en ce qui concerne la distance moyenne parcourue par jour. Alors que les personnes vivant en dehors de la zone d'influence des centres urbains parcourent près de 43 kilomètres par jour, la distance journalière moyenne des personnes vivant dans les centres urbains est de 34 kilomètres, soit 25% de moins. En ce qui concerne les motifs de déplacement, les deux espaces présentent en revanche une réparti-tion relative très similaire. Par exemple, les personnes vivant dans les centres urbains parcourent environ 45% de leur distance journalière moyenne pour les loisirs. Dans les es-paces ruraux, cette proportion est de 42%. Pour ce qui est des autres motifs de déplace-ment (travail, formation, achats, etc.), les différences sont également minimes.

Une autre différence dans le comportement en matière de mobilité entre la ville et la campagne réside dans le choix du moyen de transport (ce que l'on appelle la répartition modale du transport). Le TIM domine clairement à la campagne comme dans la zone d'influence des centres urbains. La situation est en revanche légèrement différente dans les centres urbains euxmêmes. La part des transports publics et de la mobilité douce y est en effet nettement plus élevée. Il convient également de noter que la part du TIM est presque aussi élevée dans la zone d'influence des centres urbains que dans les espaces ruraux.

On trouve une situation similaire en ce qui concerne la possession d'une voiture. Alors qu'un ménage moyen possède 1,02 voiture dans l'espace urbain central, il en possède 1,38 dans les espaces ruraux. Par conséquent, le taux de personnes possédant un permis de conduire dans l'espace urbain central (79%) est inférieur d'environ 10 points de pourcentage à celui des autres espaces. La situation est inverse pour ce qui est de la possession d'abonnements de transports publics. Dans ce domaine, les pourcentages sont clairement les plus élevés dans les centres urbains.

Remarque: la mobilité durant la crise du COVID

L'Office fédéral de la statistique (OFS) et l'Office fédéral du développement territorial (ARE) ont étudié de plus près le comportement de la population en matière de mobilité pendant la crise du COVID, ce dans le cadre de l'analyse spéciale de la mobilité Covid-19 et du monitoring de la mobilité Covid-19. Cette analyse spéciale a été réalisée à partir du micro-recensement sur la mobilité et les transports, tandis que le monitoring de la mobilité s'est appuyé sur les données des téléphones portables.

Les résultats de l'analyse spéciale de la mobilité montrent que le COVID-19 a eu un impact important sur le comportement de la population en matière de transports. La distance moyenne parcourue par jour au début de l'année 2021 a par exemple diminué de 9,8 km ou 31% par rapport à l'année précédente. Les distances parcourues en transports publics ont elles aussi connu une diminution importante. Cela s'explique par le fait que le risque de contagion est considéré comme plus important dans les TP que lorsque l’on se déplace en voiture privée. Le recul du TIM a été par conséquent moins important. En revanche, les distances parcourues en mobilité douce pendant la crise ont été légèrement plus longues qu'avant la crise.

Le monitoring de la mobilité parvient à des résultats similaires, mais permet une observation plus étendue dans le temps. Les évaluations montrent que c’est le premier confinement, en mars 2020, qui a clairement eu l'effet le plus marqué sur les déplacements. En comparaison, les autres mesures prises au cours de la crise ont eu un impact nettement moins important. Les données récoltées montrent en outre que le comportement en matière de mobilité de la population s'est en partie déjà adapté avant la prise de mesures. Cela pourrait être lié à l'évolution du nombre de cas perçue par la population.

 

La desserte en transports publics dans les zones rurales est inférieure à la moyenne

Les grandes différences dans le choix du moyen de transport présentées ci-dessus s'expliquent probablement en grande partie par les différences en termes de qualité de la des-serte par les transports publics. Celle-ci est en général nettement moins bonne dans les régions rurales que dans les régions urbaines. Cela s'explique en premier lieu par le fait que ces espaces sont moins densément peuplés. Cette différence structurelle rend difficile la mise en place d'offres de transports publics pertinentes d'un point de vue économique. 

La moins bonne desserte de l'espace rural par les transports publics apparaît par exemple si l'on considère la couverture de la population par les différentes classes de qualité des transports publics (classification de l'ARE).

 

La carte ci-dessus montre que ce sont surtout les espaces situés dans les zones d'influence des grandes agglomérations comme Zurich, Bâle, Berne ou Genève qui disposent d'une bonne desserte par les TP. Dans et autour de ces centres, des arrêts de RER, de tram et de bus desservis à des fréquences élevées assurent une offre de transports publics attrayante. De plus, ces centres sont desservis par de nombreuses liaisons à longue distance. Par conséquent, 80 à 100 % de la population résidant dans ces espaces est très bien ou moyennement bien desservie par les TP. 


La situation se dégrade ensuite au fur et à mesure que l'on s'éloigne d'une agglomération. Dans les régions de montagne en particulier, de nombreux habitants - parfois plus de 50% - vivent dans des zones qui ne sont pratiquement pas desservies par les TP (pas de couverture par une classe de qualité des TP). Le fait que les espaces ruraux soient nettement plus accessibles en TIM qu'en TP, selon l'indice d'accessibilité calculé par l'ARE, s'inscrit dans ce tableau. Il n'est donc pas surprenant que le TIM soit le principal moyen de locomotion dans les espaces ruraux. 


Accessibilité en TIM / Accessibilité en TP

Remarque: la mobilité du futur, une chance pour les zones rurales

La mobilité est actuellement en pleine mutation, notamment en raison de la numérisation. La disponibilité toujours plus grande des données de mobilité et l'émergence de nouvelles formes d'offre donnent naissance à de nouvelles offres de mobilité. Les offres de Mobility-as-a-Service en sont un exemple. Il s'agit de solutions de mobilité qui, en combinant différents moyens de transport, créent une offre de mobilité porte-à-porte transparente et adap-tée aux besoins individuels. On s'attend en outre à ce que les offres à la demande, tout comme les offres de partage, soient plus facilement accessibles à l'avenir et donc plus utilisées. La Confédération soutient le développement de telles offres, notamment par la création d'une infrastructure de données sur la mobilité.

Ces nouvelles offres contribuent également à une meilleure desserte potentielle des zones rurales. Ainsi, les habitants de ces zones peuvent par exemple utiliser le TIM pour un trajet partiel jusqu'à une plateforme de correspondance et passer ensuite aux transports publics. Inversement, il est possible de passer des TP à une offre de car sharing. Grâce aux offres de Mobility-as-a-Service, de tels voyages peuvent être planifiés rapidement, adaptés de manière flexible aux propres besoins (temporels) et réservés facilement. Cela facilite l'accès aux zones rurales et augmente ainsi leur attractivité en tant que lieu de vie et de travail. 

Si l'on se projette encore plus loin dans l'avenir, les véhicules entièrement automatisés devraient avoir une grande influence sur la mobilité et l'accessibilité des espaces ruraux. Cette technologie permettrait par exemple d'assurer une desserte fine de ces espaces à moindre coût et parfaitement adaptée aux besoins individuels.

 

Les pendulaires des zones rurales utilisent principalement le TIM

La desserte en transports publics inférieure à la moyenne ainsi que la part élevée de TIM dans les espaces ruraux se reflètent également dans les statistiques concernant les pendulaires. Les flux de pendulaires qui partent des communes rurales utilisent dans la grande majorité des cas le TIM comme moyen de transport principal. Il en va de même, quoique de manière un peu moins prononcée, dans la direction opposée, c'est-à-dire pour les flux de pendulaires qui ont pour destination des communes rurales. 

Il est intéressant de constater que le tableau est différent pour les centres ruraux que pour les communes rurales. En particulier, les flux de pendulaires vers les grandes villes et les agglomérations présentent pour ces communes une part de TIM comparativement faible et, par conséquent, une part de TP plus élevée. Cela s'explique probablement par le fait qu'il existe souvent des liaisons ferroviaires attrayantes pour ce type de trajets. On constate parallèlement que la desserte fine en TP dans l'espace rural est actuellement très hétérogène et partiellement peu attractive. De nouvelles offres de mobilité plus orientées vers les besoins pourraient donc permettre d'augmenter la part des TP (voir le commentaire ci-dessus). 

De manière générale, le nombre de pendulaires a fortement augmenté au cours des 30 dernières années. Alors qu'en 1980, en Suisse, 1,2 million de personnes faisaient la navette entre leur domicile et leur lieu de travail, elles étaient 2,6 millions en 2015, soit plus du double. Cette évolution ne s’explique pas seulement par la croissance de la population, mais aussi par la dissociation des lieux de résidence et de travail. Ce désenchevêtrement croissant apparaît par exemple lorsqu'on observe la part des pendulaires entrants et sortants par rapport à la population résidante permanente. Depuis 1980, ces proportions ont fortement augmenté dans tous les types d'espaces. En raison de la concentration des em-plois dans les zones urbaines, la part des pendulaires entrants est plutôt élevée dans ces zones, alors que la part des pendulaires sortants est surtout importante dans les espaces ruraux. L'augmentation observée de ces contrastes est notamment une conséquence de la croissance de l'emploi qui a eu lieu au cours des dernières décennies, surtout dans les espaces urbains.

Il est également intéressant de voir dans ce contexte quels flux de pendulaires ont le plus augmenté. En termes relatifs, il s'agit en particulier des flux de pendulaires des espaces urbains et intermédiaires vers les espaces ruraux. En termes absolus, ce sont les flux de pendulaires entre les villes qui ont le plus augmenté (croissance d'environ 280'000 pendulaires entre 2000 et 2015), suivis des flux de pendulaires des espaces intermédiaires vers les espaces urbains (croissance d'environ 130'000 pendulaires entre 2000 et 2015).
 

Les comportements en matière de mobilité vont continuer à évoluer

Les explications ci-dessus montrent qu'il existe d'une part des différences de comportement en matière de mobilité entre la ville et la campagne. D'autre part, ce même comportement a évolué au fil du temps - par exemple, les déplacements pendulaires ont fortement augmenté au cours des 30 dernières années. Si l'on se tourne vers l'avenir, on peut s'attendre à ce que les comportements en la matière continueront à évoluer, par exemple en raison des changements démographiques. Avec une part croissante de la population ayant dépassé l'âge de la retraite, l'importance du trafic de loisirs a tendance à augmenter. Une autre évolution importante est due à l'apparition du travail à domicile, qui s'est établi dans notre société pendant la pandémie de coronavirus. Enfin, de nouvelles offres de mobilité, notamment l'apparition d'offres à la demande, de partage et de mobilité en tant que service, marqueront également le comportement de demain en matière de mobilité, tant en ville qu'à la campagne.

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